Les électeurs ne se prononceront pas sur l’acquisition du F-35 avant la signature du contrat

Présentation du F-35A le 23.03.2022 à Emmen, @Neo-Falcon Creations,

Voilà une nouvelle qui chagrine voire fâche parmi la gauche, mais aussi en France voisine. En effet, le Conseil fédéral a décidé cette semaine qu’il n’octroierait pas à l’initiative « Stop F-35 » un traitement spécial. De ce fait, ce texte ne pourra pas être traité avant la session d’hiver par le Parlement, empêchant d’organiser un scrutin avant fin mars.

Le Conseil fédéral avance plusieurs raisons à cet empressement. Le premier est tout simplement légal : si l’on commence à accorder un traitement spécial à une initiative, pourquoi ne pas en accorder à d’autres ? Cela créerait en effet un précédent dangereux, bousculant les procédures établies. Les initiants, tout fâchés qu’ils soient, étaient parfaitement au courant de ces délais légaux lors de la récolte de signatures, tandis que le DDPS et sa cheffe ont annoncé relativement tôt la couleur : il faut récolter les paraphes avant juin, sinon il sera très difficile de mettre sur pied une votation.

La deuxième raison est technique : l’offre faite par Lockheed Martin court jusqu’à fin mars. Si elle n’est pas signée d’ici-là, une autre offre devra être demandée, avec le risque de voir les délais de livraison augmenter, plusieurs nations (Finlande, Canada et Allemagne notamment) ayant également sélectionné l’appareil américain depuis que le Conseil fédéral a arrêté son choix.

Si certains voient ici une manœuvre du DDPS, il faut rappeler que c’est la chancellerie fédérale qui traite les questions relatives au traitement des initiatives et référendums. Quand bien même, rappelons que l’hypothétique tenue de cette initiative est déjà bien peu honnête en soi. C’est que le cadre avait été très clairement et intelligemment posé par le Conseil fédéral lors de la votation de septembre 2020 : les électeurs se prononcent sur un principe et un budget, soit l’acquisition de 30 à 40 avions de combat pour 6 milliards de francs, et non sur un modèle. Certains commentateurs avancent que le gouvernement fédéral craindrait le résultat de ce scrutin, oubliant fortuitement qu’une guerre de haute intensité se déroule en Europe, et que celle-ci a eu un impact significatif sur l’opinion publique. De plus, nombre d’électeurs trouvent la manœuvre de la gauche très peu fair-play démocratiquement parlant. L’un dans l’autre, Mme Amherd n’a donc pas foncièrement de quoi être inquiétée par le résultat de cette votation.

Ajoutons que si les opposants avaient parlé de chèque en blanc en automne 2020, ils ont quelque peu oublié les limites de notre système démocratique en passant. Il faut avouer que si nous pouvons théoriquement nous prononcer sur tout, il est bon de se rappeler que nous ne sommes pas des spécialistes et que la complexité des objets qui peuvent nous être soumis n’est pas sans limite. Qui aura honnêtement compris tous les tenants et aboutissants de la RFFA ? Pas le rédacteur de ce billet en tout cas. Dans le même ordre d’idée, il faut avoir le courage de dire que les citoyens de ce pays n’ont pas les capacités d’évaluer un avion de combat. Pourquoi ? Premièrement car la masse de données et bien trop grande pour être analysée par une seule personne. De plus, une certaine quantité de ces données est classifiée. Et pas les moins importantes, qui plus est ! Comment donc se prononcer en son âme et conscience sur un objet dont on ignore 20% ou 30% des caractéristiques ? Enfin, il est fort probable qu’il n’y ait pas une personne dans ce pays qui puisse à elle toute seule définir quel est le meilleur avion. En effet, le pilote a des compétences et une expertise qui ne sont pas les mêmes que celles du mécanicien, qui diffèrent également de celles du diplomate, du logisticien, de l’armurier, du contrôleur aérien, du financier et de l’industriel. Il aura fallu des mois pour ces équipes de spécialistes pour se prononcer, mais un simple citoyen pourrait faire le même travail en quelques semaines seulement ? Quelle malhonnêteté !

Le peuple s’étant prononcé sur un principe, il aurait été de bon ton de respecter son verdict, même si celui-ci n’était guère net, avec 50.1% des voix. Mais ce n’est pas la voie choisie par le GSsA et ses alliés socialistes et écologistes. Non seulement veulent-ils absolument nous faire voter sur le modèle, mais essaient également de revenir sur le résultat de septembre 2020. Rappelons que le texte de leur initiative est le suivant :

1. La Confédération n’achète pas d’avions de combat de type F-35.

2. Le budget de l’armée est adapté en conséquence.

3. La présente disposition cesse de produire effet le 1er janvier 2040.

La gauche fait croire que ce vote concerne uniquement l’avion de Lockheed Martin, mais l’alinéa 2 ci-dessus dit le contraire. En effet, si l’initiative est acceptée, l’armée n’aura plus de budget dédié au remplacement des avions de combat, empêchant d’en sélectionner un autre (pour peu que cela soit possible sans relancer encore une fois tout le processus d’acquisition) et mettant une pression énorme sur nos forces aériennes.

Nous n’avons pas toujours été tendre à l’égard du F-35, mais il est grand temps que la farce démocratique mise sur pied par la gauche sur ce dossier prenne fin. Ce n’est pas avec ce genre de manœuvre que notre démocratie en sortira grandie.

PS : pour les commentateurs de génie habituels, vous constaterez qu’en ayant pour source le site « Stop F-35 », on arrive quand même à être critique vis-à-vis des initiants. Dingue.

Sources :

https://stop-f-35.ch/fr/argumentaire

https://www.vbs.admin.ch/fr/aktuell/communiques.detail.nsb.html/90052.html