
Hier les entreprises d’armement suisses et américaines RUAG MRO (la fameuse partie de l’ancienne fabrique fédérale restant en mains publiques) et Raytheon Technologies ont signé un mémorandum d’entente permettant d’officialiser leur coopération.
Ainsi, la compagnie helvétique sera chargée de produire « des équipements de maintenance et d’assistance spécialisés, la fabrication de simulateurs de formation à la maintenance, et l’adaptation de véhicules et de remorques permettant de répondre aux exigences requises à la mobilité en Suisse. En outre, RUAG mettra en place un centre local de maintenance, de réparation et de révision (CMRR), qui fournira un centre de service complet pour effectuer la maintenance et la réparation de niveau intermédiaire de tous les composants du système Patriot. Le CMRR prendra en charge les réparations de niveau supérieur, normalement effectuées au niveau du fabricant. Cette capacité permettra à RUAG de constituer le premier centre de réparation régional européen de Patriot du genre, un soutien accessible à tous les utilisateurs de Patriot dans la région. »
Dans ce cadre, l’entreprise américaine, et les États-Unis avec elle, montrent ici vouloir remplir les obligations liées aux affaires compensatoires ayant trait à l’acquisition de ce système antiaérien. Lors des grandes discussions politiques sur le projet Air2030, le Parlement avait finalement décidé que 60% de la somme du contrat devaient être compensés en Suisse. Plusieurs variantes, à 100% et 80% avaient également été discutées, et un compromis à 60% avait été trouvé, notamment parce qu’il avait été avancé que ces « offsets » renchérissait la valeur des contrats. La valeur effective des affaires compensatoires liées à l’acquisition du F/A-18 avait également été largement discutée à cette occasion. Quoi qu’il en soit, c’est une bonne nouvelle industrielle et économique pour la Suisse. En revanche, on peut se poser la question du rapprochement diplomatique et militaire que cela suppose. Plus largement encore, il faudra se demander dans quelle mesure ce genre d’accord est compatible avec le statut de neutre.
Pour rappel, 18 nations ont commandé le système Patriot, dont 8 en Europe. Celui-ci a été proposé à la Suisse par Raytheon en collaboration avec Rheinmetall Air Defence SA, qui travaille déjà pour le DDPS, notamment au travers de la fourniture et l’entretien des canons antiaériens Oerlikon de 35 mm. Selon le DDPS, le système américain a été préféré à son concurrent européen SAMP/T de Eurosam en raison de ses frais d’acquisition compétitifs. Ceux-ci, renchérissement et TVA jusqu’à l’échéance du paiement compris, se montent à 1,970 milliards de francs pour cinq systèmes. De plus, Patriot se serait distingué du SAMP/T « dans les quatre critères principaux [d’évaluation], parfois de manière significative.
Quoi qu’il en soit, cette annonce ainsi que les dernières déclarations de Mme Amherd semblent finir de doucher les espoirs de ceux qui souhaitent encore voir d’autres systèmes, notamment français, revenir dans la course d’Air 2030.
Sources :
https://www.ruag.ch/fr/news/06-10-21/ruag-et-raytheon-technologies-annoncent-un-partenariat
https://www.vbs.admin.ch/fr/aktuell/communiques.detail.nsb.html/84275.html
https://www.letemps.ch/economie/avions-combat-un-compromis-affaires-compensatoires