
Épisode 3 : la comptabilisation des militaires SL, leur nombre effectif et leur répartition au sein de l’armée
Pour notre troisième épisode sur le rapport du Contrôle fédéral des finances (CDF) à propos du modèle de service long (SL), nous allons aborder la problématique de la prise en compte des militaires « de réserve » dans les effectifs de l’armée, ainsi que le nombre de soldats en service long et la manière dont ils sont incorporés au sein des différentes unités de l’armée.
Premièrement, et comme nous l’avons indiqué dans notre « premier épisode », les militaires en SL restent incorporés dans l’armée durant 4 ans, même s’ils ont accompli l’entier de leurs jours de service. Ils restent mobilisables durant ce laps de temps. Ainsi, entre 14 et 15 000 militaires seraient disponibles en tant que « réserve », même si celle-ci a été supprimée avec la réforme Développement de l’armée (DEVA). De ce fait, ces militaires ne sont pas comptabilisés dans l’effectif réglementaire. Le Conseil fédéral justifie cela par le fait que les membres de cette réserve qui ne dit pas son nom requièrent une mise à niveau avant tout déploiement.
Durant la crise du coronavirus, 639 anciens militaires en service long ont été appelé, et 332 ont ensuite été déployés, montrant que l’intégration de ces réservistes à des formations d’active n’était de loin pas impossible. Partant de ce constat, le CDF a demandé que ces militaires soient à nouveau comptabilisés dans les effectifs. Le Groupement Défense a répondu que cela sera proposé à l’Assemblée fédérale, même si cette modification pouvait entraîner une diminution des effectifs dans d’autres formations, notamment celles du modèle avec cours de répétition (CR), modifiant ainsi la structure générale de nos forces armées, et, potentiellement, leur état de préparation général.
Toujours sur la question du nombre, le CDF se penche également sur la proportion de 15% des militaires en SL sur le total des effectifs de l’armée. Celle-ci, établie lors du lancement de ce modèle en 2004, devait correspondre aux besoins de l’armée. Au passage, notons que le Conseil fédéral n’avait initialement pas fixé de proportions, s’interrogeant sur la comptabilité du SL avec le principe de milice.
Avec le DEVA, ses 100 000 hommes et ses deux départs d’école de recrues (ER) par année, l’armée s’attend donc à incorporer 2700 conscrits dans le modèle en service long, sur 18 000 appelés. Si ce nombre représente presque exactement 15%, il ne permet in fine pas toujours d’atteindre l’objectif, car un certain nombre de militaires quittent le service au cours de leur ER, soit pour des raisons médicales, soit pour opter pour le service civil (même si cette deuxième option est dans 95% des cas le fait de militaires du modèle avec CR). Les effectifs n’ont ainsi pas été entièrement complétés en 2014, 2016 et 2018. Pour que 2700 militaires en SL soient effectivement en service à la fin de leurs 300 jours de service, il faudrait en affecter initialement environ 25% de plus. Les exemples de ces dernières années montrent cependant que ce raisonnement n’est pas toujours pertinent, et que la pratique actuelle permet de compléter les unités de manière relativement satisfaisante. L’effectif réglementaire a par exemple été atteint parfaitement en 2013, 2015, et même dépassé en 2011 et 2017. Il est donc difficile de tirer un constat général de ces chiffres.
Le CDF s’est également penché sur l’affectation des conscrits en service long. Comme nous l’avons déjà vu, l’objectif des bataillons en SL est d’assurer un haut niveau de disponibilité (moyens de la première heure) et de fournir un service permanent. Seulement, le CDF juge que toutes les unités, et notamment le détachement de l’État-major de l’armée en service long et, dans une moindre mesure, la compagnie de défense anti-aérienne et une grande partie de la compagnie de la police militaire ne démontrent aujourd’hui pas forcément un grand intérêt à utiliser le modèle de service long. En effet, le premier n’a pas d’exigences en matière de disponibilité opérationnelle tandis que les deux autres ne font pratiquement que de soutenir les employés civils, ce qui ne justifie donc pas forcément l’utilisation du modèle de service long.
Le CDF constate également que la répartition des militaires entre les différentes formations SL n’est ni claire, ni documentée. Ainsi, 27% des conscrits sont affectés à l’infanterie, 16% à l’aide en cas de catastrophe, 15 à la logistique, 12% aux communications de même qu’à la police militaire, tandis que le reste se répartit entre l’État-Major, la défense anti-aérienne et d’autres affectations diverses. Pour remédier à ce flou relatif, le CDF recommande donc que le Groupement défense examine périodiquement, (p. ex. tous les trois ans), de manière transparente et compréhensible, les différents besoins en militaires en service long au sein des différentes catégories de troupes et fasse un rapport à ce sujet, et de voir dans quelle mesure la proportion de soldats en service long devrait être augmentée, proposition qui est donc réitérée dans le rapport du CDF.
Sources :