Ces dernières années, la question de l’alimentation de l’armée en effectifs revient fréquemment animer les débats au Parlement. En effet, le nombre de passages de conscrits au service civil dépasse les 6000 tandis que deux classes d’âge seront libérées en 2028 et 2029 du fait de la réforme DEVA. Le DDPS s’attend ainsi à ce que l’effectif réel soit de 125 000 militaires d’ici la fin de la décennie, quand il devrait normalement être de 140 000.
Pour faire face à cette hémorragie, différentes mesures ont déjà été proposées, aux chambres fédérales comme sur Livret de service. Qui de durcir l’accès au service civil, qui d’améliorer le fonctionnement de l’armée sur un certain nombre de points.
C’est la deuxième approche que la Conseillère aux États Marianne Binder-Keller (LC, AG) a choisi d’adopter. Celle-ci a en effet déposé un postulat visant à faciliter et accélérer l’accès au service militaire sans arme. Selon elle, la possibilité existe aujourd’hui, mais elle reste marginale car les démarches administratives sont bien plus complexes à accomplir que celles permettant d’être transféré au sein du service civil.
En facilitant ces procédures, il serait peut-être possible de diminuer l’ampleur de l’exode que connaît aujourd’hui l’armée. La politicienne a donc demandé que la chose soit étudiée par le Conseil fédéral. Celui-ci avait déjà répondu lors du dépôt du texte que cette possibilité représentait un risque pour la sécurité, ce qui a suscité le scepticisme de la Conseillère aux États. En effet, si cela est réellement problématique, pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas tout simplement supprimé cette possibilité ? Ajoutons qu’il existe en effet un certain nombre de tâches administratives, logistiques ou dans la cyber-défense qui ne requièrent pas forcément que le militaire soit équipé d’une arme à feu, surtout dans ce dernier domaine.
L’écologiste neuchâtelois Fabien Fivaz n’a pas manqué de signaler, en substance, qu’il était dommage de vouloir restreindre ou diminuer l’attrait du service civil et qu’il ne fallait pas faire de lien entre ce dernier et le service militaire sans arme. Ah bon.
Enfin, Martin Pfister est intervenu pour expliquer la position du Conseil fédéral. Celui-ci s’oppose à l’idée contenue dans le postulat car il ne voudrait pas que le service sans arme soit choisi par commodité (pas de tirs obligatoires, service militaire moins pénible, etc.). Il indique en outre que l’arme constitue un rôle important dans l’autoprotection des militaires et que le nombre de ceux-ci n’en portant pas ne devrait pas être trop élevé.
La chambre des cantons était manifestement tiraillée entre les arguments des uns et des autres et a fini par accepter la proposition par 17 voix contre 16 et 6 absentions. Le Conseil fédéral devra donc étudier la possibilité de faciliter quelque peu l’accès au service sans arme.
Si cette idée n’est évidemment pas la panacée, elle constitue un petit levier permettant de pallier les problèmes d’effectifs de l’armée, comme d’ailleurs l’assujettissement des double-nationaux français au service militaire suisse, sur lequel nous reviendrons.
Sources :
Communiqué de presse du DDPS, 13.11.2025 : https://www.vbs.admin.ch/fr/newnsb/xuwUeOIz_xaTbi1NC9840
Objet 25.4108, postulat Binder-Keller « Faciliter l’accès au service militaire sans arme au sens de l’article 16 de la loi sur l’armée », 24.09.2025 : https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20254108
Objet 25.4108, postulat Binder-Keller « Faciliter l’accès au service militaire sans arme au sens de l’article 16 de la loi sur l’armée », débat au Conseil des États, 03.12.2025 : https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/amtliches-bulletin/amtliches-bulletin-die-verhandlungen?SubjectId=69631