
Le DDPS est l’un des plus gros propriétaires immobilier du pays. En effet, il doit gérer environ 24 000 ( !) objets dispersés dans toute la Suisse. Si tous ces bâtiments et ouvrages ne sont évidemment pas adaptés à la production d’énergie issue de panneaux photovoltaïques, le potentiel reste tout à fait intéressant. Le département évalue à 7000 le nombre de bâtiments et installations adaptés à la production d’électricité. Et pourtant, l’Armée ne produisait en 2018 que 5.2 GWh, alors que le potentiel se montait à 44GWh annuels. Partant de ce constat, le conseiller national socialiste Beat Jans a déposé durant la session parlementaire d’été 2019 un postulat demandant au Conseil fédéral de « présenter un rapport qui évaluera dans quelle mesure la dépendance de l’armée par rapport aux énergies fossiles et au transport d’électricité sur de longues distances représente un risque pour la sécurité. »
Conscient aussi bien des problèmes environnementaux et stratégiques que la question de l’énergie pose, le Conseil fédéral a proposé aux parlementaires d’accepter ce postulat. Celui-ci a été traité durant la session d’été 2021 et n’a rencontré comme adversaire que l’UDC, pour qui le DDPS allait déjà dans le sens du texte. En effet, l’objectif du département de la défense est de produire 25 GWh annuels d’ici 2030, soit 4 fois plus qu’aujourd’hui. Le postulat a finalement été adopté sans grand débat par 125 voix contre 51.
Quoi qu’il en soit, il demeure quelque peu étonnant et décevant que le DDPS soit aussi lent au démarrage sur la question de la production d’électricité photovoltaïque. En effet, cette énergie est aujourd’hui totalement maîtrisée et connue, et surtout tout à fait rentable. Investir dans ce secteur permettrait à l’Armée de faire, à terme, quelques économies intéressantes, en plus de devenir plus indépendante de l’étranger. L’investissement pourrait devenir d’autant plus intéressant si le parc de voitures de tourisme, puis d’utilitaires, était progressivement remplacé par des véhicules électriques, alimentés directement par l’énergie produite en caserne. Il deviendra d’autant plus intéressant si les moteurs à hydrogènes venaient à entrer en service durant la décennie. Durant la journée, le surplus d’électricité pourrait ainsi être « stocké » sous forme d’hydrogène, permettant de faire le plein des véhicules à leur arrivée en caserne. L’opportunité de créer des microgrid sur les places d’armes devrait également être envisagée, puisque cela permet d’obtenir de meilleurs prix à l’achat, et de revendre les excédents de production s’il y en a.
En définitive, l’Armée a encore de gros efforts à réaliser dans le domaine énergétique. Celui-ci, loin d’être un simple effet de mode créé par les « bobos des villes », représente en réalité un enjeu financier et stratégique certain. Si l’Armée semble en avoir enfin pris quelque peu conscience, il lui manque encore cruellement de moyens pour faire face en même temps à tous les enjeux qui s’imposent à elle durant cette décennie.
Sources :
https://www.letemps.ch/economie/letat-collectionne-places-leader-marche
https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20193779