
3ème service pour le rapport sur les projets ! Il s’agit certes d’une longue série, par ailleurs pas encore terminée, mais qui est toujours riche d’enseignements.
Ainsi, après nous être penchés sur les programmes ayant trait à Air2030, place aux autres projets liés aux Forces aériennes. Parmi eux se trouvent la prolongation de la durée d’utilisation des avions de combat F/A-18, l’acquisition de l’ADS 15 (drone de reconnaissance), et le maintien de la valeur de l’hélicoptère Cougar.
Procédons dans l’ordre et débutons avec la prolongation des F/A-18. Pour rappel, ceux-ci doivent être remplacés par les F-35, mais la lenteur du processus ainsi que l’échec de l’acquisition du Gripen ont fait que notre flotte actuelle doit rester en service quelques années de plus qu’initialement envisagé. Les aéronefs produits par Boeing doivent donc théoriquement pouvoir voler jusqu’en 2030, si, évidemment, tout se passe comme prévu du côté de Lockheed Martin.
Dans ce cadre, l’objectif est de réparer et renforcer la structure des chasseurs en service pour que celle-ci, initialement conçue pour effectuer 5000 heures de vol, puisse atteindre les 6000 heures., mais aussi de remplacer des sous-systèmes et des composants dont l’exploitation et l’entretien deviennent coûteux et difficiles à effectuer.
Au départ, l’objectif était que ce projet soit terminé en 2025, puisque c’est à cette date-là que nos avions devaient atteindre la fin de leur durée de vie initiale, mais RUAG rencontre des difficultés pour effectuer ces travaux tandis que les fournisseurs ont de la peine à livrer le matériel commandé. Dans ce cadre, le montant initialement prévu ne sera pas dépassé mais… seuls 15 des 30 F/A-18 verront leur structure être rénovée ! Les autres seront simplement contrôlés plus fréquemment. Les différentes branches de RUAG, dont le capital confiance a été très écornés ces dernières années par les affaires d’espionnage, d’acquisition douteuses, de mauvaise maîtrise de ses programmes, n’en finissent plus d’enchainer les déconvenues. C’est d’ailleurs en partie pour cela que le Conseil fédéral a souhaité s’en séparer : éviter les scandales à répétition. En définitive, le programme F-35 n’a donc pas le droit à l’erreur du point de vue du calendrier, car notre flotte vieillissante aura de la peine à encaisser une énième prolongation de son utilisation.
Concernant le drone ADS 15… soupire. Ce système, basé sur le drone israélien Hermes 900 de l’israélien Elbit system, avait été sectionné par la Suisse et son acquisition approuvée par le Parlement au travers du Programme d’armement 2015, pour 250 millions de francs, après déjà 7 années de procédure. Ces 6 aéronefs doivent remplacer les ADS 95, mis hors service à la fin de l’année 2019, avec d’importantes capacités de récolte de données.
Si ces appareils devaient rentrer en service en 2020, les retards et déconvenues n’ont cessé de s’enchainer. Le système anticollision (Sense and Avoid) n’est pas encore développé au moment du choix de l’appareil. Or, sans celui-ci, difficile de sillonner les cieux suisses. Et la mise au point n’est manifestement pas une sinécure. En 2021, un drone devant être livré à la Suisse s’écrase du fait de vibrations et la flotte entière doit être révisée. En 2022, la moitié de la flotte est stationnée en Suisse mais un nouvel incident survient et cloue celle-ci au sol. Enfin, le conflit israélo-palestinien reprend dès octobre 2023, imposant à Tel-Aviv de mobiliser son industrie de l’armement, au détriment de ses clients étrangers, selon ce que l’on peut comprendre de la communication du DDPS. Dès lors, ce ne sera qu’en 2026 que ces drones pourront être utilisés par nos Forces aériennes, si de nouveaux retards ne viennent pas s’ajouter d’ici-là. Du point de vue financier, les choses sont encore aujourd’hui peu claires étant donné que la responsabilité de ces retards incombe au fournisseur et que celui-ci, semble-t-il, devra payer de pénalités pour cela.
Encore une réussite à mettre au bilan de M. Maurer, même si tout ne lui est évidemment pas imputable. Remarquons tout de même que les risques liés au développement du système « Sense and Avoid » avaient été jugés comme « moyens », comme pour le Mortier 16 d’ailleurs…
Enfin, le maintien de la valeur de l’hélicoptère Cougar connaît lui aussi quelques soubresauts. Pour rappel, l’objectif est de prolonger jusqu’à 2030 la durée de vie de ces hélicoptères de transport moyen acquis dans le cadre du programme d’armement 1998. Ceux-ci sont utilisés autant pour l’armée, en Suisse comme à l’étranger, que dans le cadre d’opérations au profit d’acteurs civils comme l’extinction d’incendies ou pour des opérations de recherche et de sauvetage.
Le maintien de la valeur de ces 9 aéronefs « comprend un nouveau système d’autoprotection avec des capacités améliorées, de nouveaux appareils radio de bord, un système d’identification ami ou ennemi de la nouvelle génération ainsi que l’ajout de la capacité à réaliser des procédures d’approche par satellite. » En outre, ils se verront équipés ’un nouveau système d’alerte de trafic et d’évitement, d’un viseur de casque ainsi que de diverses autres fonctionnalités et seront ainsi largement harmonisés avec le Super Puma. Leur structure sera également révisée. Initialement budgété à 180 millions, la révision de ces 9 appareils coûtera finalement 227 millions de francs, soit 25 millions/pièce. Comme pour les DURO, à ce niveau de prix et ces délais, l’on peut se demander si l’acquisition d’hélicoptères neufs n’aurait pas été plus avantageuse… Le dernier appareil rénové devrait être livré cette année.
Le constat s’impose : non seulement les projets liés aux Forces aériennes mobilisent d’importantes ressources humaines, financières et techniques, mais cet état de fait est encore renforcé par une gestion au minimum questionnable de ceux-ci, ce qui n’est évidemment pas de nature à nous rassurer pour l’avenir.
Sources :
https://www.vbs.admin.ch/fr/projets-principaux
https://www.avianews.ch/post/f-a-18-retard-annonc%C3%A9-pour-la-prolongation-de-vie
https://www.letemps.ch/suisse/les-drones-maudits-de-l-armee-suisse